La couleur des choses de Martin Panchaud
Fauve d’or à Angoulême en 2023, le livre la couleur des choses de Martin Panchaud m’a été offert le mois dernier par un ami, qui m’en disait le plus grand bien. Exercice de style très particulier, le titre prend le risque d’être réduit à sa forme et réussit son pari en proposant une histoire qui tient bien la route.
Simon, jeune anglais de 14 ans, mal dans ses pompes mais pas bête, quelque peu enveloppé mais pas empoté, vit sa vie d’ado entre sa mère protectrice et son père alcoolique et déprimé par la tournure que prend son existence, entre ses potes de quartier pas tendres et ses fantasmes sur Lorna, jeune soeur de l’une des petites frappes du coin. Tout se passe dans une morosité normale jusqu’au jour où, sur les conseils d’une voyante, Simon se dit qu’il devrait tout miser sur une course de chevaux et vole les quelques économies de son père pour effectuer le pari. Sûr de son coup, le pari s’avère payant et il remporte le gros lot. Il rentre alors tout heureux chez lui, nouvellement riche de plusieurs millions, pour découvrir une maison sens dessus dessous, sa mère dans le coma et son père disparu. Trimbalé entre commissariat et institution de placement et hôpital où sa mère est soignée, objet de convoitise quand publicité est faite de son succès au jeu, le jeune Simon voit son aventure se transformer en road trip lorsqu’il décide de suivre un homme, s’étant présenté comme un ami de sa mère et venu les aider.
Premier élément immanquable : le style ! La couleur des choses est une oeuvre visuelle, séquentielle, qui invite le lecteur à faire un pas de côté par rapport aux repères classiques de la bande dessinée. On pourrait parler d’une forme de minimalisme dans la visualisation : les personnages sont représentés par des points de couleur, les objets par une iconographie aux apparences simples… Au-delà de ces aspects, l’oeuvre fait intervenir à plusieurs reprises des mises en scène quasi infographiques pour expliquer les lieux, les déplacements, la course de chevaux… Forme du livre tout à fait singulière.
Sur le fond, passé le côté déroutant de sa représentation originale, la couleur des choses est avant tout le récit d’un ado à la vie difficile, qui apprend à sortir de son innocence pour se tracer un chemin vers une vie apaisée. La narration fait la part belle aux rebondissements intelligents et à une mise en scène inattendue : on se surprend à éprouver de l’empathie pour ce point de couleur orangé, naïf et fragile, que la vie n’épargne pas, mais qui ne se laisse pas abattre. L’auteur parvient même à intégrer un élément perturbateur, dont le lecteur comprend qu’il finira par jouer un rôle dans le dénouement de l’intrigue, et qui marche parfaitement.
Bref, le tout fonctionne très bien, sans pour autant n’être qu’un pari de forme. Il me reste simplement une chose qui me turlupine : pas sûr d’avoir saisi la raison de ce titre. Si vous avez une interprétation, je suis preneur !
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[…] d’or d’Angoulême se suivent et ne se ressemblent pas ! Après la lecture récente de la couleur des choses, j’ai lu Monica de Daniel Clowes, qui vient de remporter la prestigieuse distinction du […]
[…] Fauves d’or se suivent et ne se ressemblent pas ! Après avoir lu Monica, prix 2023, et la Couleur des choses, prix 2022, j’ai lu récemment l’Accident de chasse de MM. Blair et Carlson, prix 2021. […]