Légendes de la Garde de David Petersen
Cela faisait un moment que j’avais repéré la série de David Petersen “Légendes de la Garde” ou “Mouse Guard” dans son appellation originale. C’est finalement au détour des stands à Angoulême cette année que, tombé sur les versions anglaises des tomes, je me suis laissé embarquer pour ces aventures épiques au monde médiéval des souris !
Les Légendes de la Garde narrent l’histoire de la garde, corps armé spécial en charge de la défense du territoire des souris, de ses habitants, ses villes, ses routes, face à toutes menaces extérieures : royaume des belettes, des furets, dangers représentés par les prédateurs naturels des rongeurs que sont serpents, chouettes… Les deux premiers tomes, Automne 1152 et Hiver 1152, suivent plus spécifiquement un détachement de la garde, composé des intrépides Saxon, Kenzie, Lieam et Sadie, dans leur enquête pour déjouer une conspiration politique visant à destabiliser leur territoire. En chemin, l’équipe fait la rencontre de Celanawe, héro âgé, porteur de la Hache Noire. Le troisième tome publié en français – la Hache Noire – commence après le récit des deux premier et constitue en réalité une remontée dans le temps, décrivant la façon dont Celanawe a fait l’acquisition de l’arme légendaire.
Tout est réussi ! Commençons par l’univers : Petersen a développé un environnement aux mille détails, différents peuples, différentes villes, des traditions et une Histoire qui unit les personnages. Le découpage des tomes par tranches historiques différentes (cf. les compilations de Legends of the Guard en anglais, qui explorent des histoires traditionnelles des souris), contribue à la richesse de cet univers. Le tout s’appuie sur une approche graphique médiévale solide, qui rend ce monde et ses habitants à la fois crédible et très attachant.
Attachant car les protagonistes des histoires rapportées ont des personnalités bien établies, chacun avec ses propres enjeux au regard de la trame globale dont ils sont acteurs. Le dessin, soigné, beau, y est naturellement pour beaucoup : il se dégage de chaque souris des traits, des expressions qui font sa personnalité. Légendes de la Garde, c’est également une série dont les ambiances sont très abouties : royaume souterrain abandonné, routes de campagne, place forte, petit village, place de marché, habillés tour à tour des couleurs de l’automne, de l’hiver et du printemps. Vraie générosité du dessin, régal pour les yeux.
Le travail d’écriture des personnages et l’habillage graphique servent des histoires bien menées. Entre compositions, et parfois mignoneries, dont on voit bien qu’elles sont pensées pour les plus jeunes, il ne faut pas s’y tromper : les Légendes de la Garde ont de vrais enjeux et ont une mise en scène dramatique qui ne laisse rien au hasard. Les souris sont des êtres petits et fragiles dans un monde très vaste et cruel, et c’est leur ténacité qui est mise à l’épreuve pour avoir le droit de vivre en paix. Qu’il s’agisse de déjouer un complot, menace existentielle, ou de se mettre en quête de ce qui leur revient légitimement, les personnages sont très régulièrement placés dans des situations délicates, à l’issue parfois fatale.
Excellente série donc, entrant dans cette catégorie des oeuvres jeunesse qui prennent leur public au sérieux. En ce qui me concerne, le signe qui ne trompe pas : avoir envie de toujours plus d’histoires dans cet univers, tant c’est bien bâti. Pour qui a connu l’expérience grisante du jeu de rôle médiéval fantastique ou a rêvé devant des récits dans ce type d’ambiance, les Légendes de la Garde seront une lecture délicieuse !