La mort de Staline de Nury & Robin
Ce double volume de la Mort de Staline trainait dans ma bibliothèque depuis un bout de temps. Là, c’est le flottement entre deux bouquins qui a laissé la place ce weekend à cette oeuvre dont le scenario est signé par l’excellent Fabien Nury. J’avais énormément aimé son “Il Etait Une Fois en France” : de la BD historique, fouillée et documentée, mise en scène avec brio et avec une impossible morale à en tirer, tant le personnage abordé sème le doute dans l’esprit du lecteur sur la question de savoir si l’on a affaire à un salaud ou à un saint.
Dans le cas de la Mort de Saline, l’actualité tragique de la guerre en Ukraine tisse un lien désagréable avec cette lecture, notamment du côté d’un héritage historique qui n’a jamais fait l’objet d’une lecture critique de l’Histoire. Pour ne citer que ce simple fait, on trouve en Russie des choses étranges, notamment le fait par exemple que le Petit Père du Peuple a sa mosaïque dans une cathédrale patriotique. Ca pose tout de même sacrément (!) la question de la culture politique soviétique et de son héritage au temps présent. Comme le rappelait un commentateur récemment, le KGB et l’Eligse sont les deux seules institutions à avoir survécu à l’effondrement du bloc soviétique et cela n’est en rien un hasard. La BD de Nury, qui par bien des aspects arrange l’Histoire pour les besoins de la fiction, rend très bien l’atmosphère qui régnait dans les instances du Parti en 1953, atmosphère qui naturellement devient caricaturale face à une crise de l’ampleur de la disparition du Grand Chef ! On y voit s’y déployer, au moment de la succession à la tête du Parti et du Pays, toute la pourriture du système, le mensonge, le viol, le meurtre, le fait que chaque membre du Comité Central est en réalité en sursis, en proie à l’accusation de ne pas être authentiquement communiste…
Pas aussi fort que la précédente lecture de Nury, mais néanmoins très bien foutu : noirceur d’une époque et de ses acteurs comme si on y était