Les récits d’Odessa de Babel
Les récits d’Odessa d’Isaac Babel sont une collection de courtes histoires qui se déroulent dans les bas fonds du quartier juif d’Odessa. Les récits mettent en scène la pègre juive du coin, organisée autour de la figure centrale de Benia Krik, le roi d’Odessa, et de ses divers trafics et coups d’éclat. L’atmosphère y est joyeusement bordélique, violente et drôle.
Dans un doux mélange d’effronterie et de respect du code d’honneur des gangsters façon slave du bord de mer du début de l’ère soviétique, l’auteur nous livre ce qui constitue probablement un souvenir d’enfance, le goût d’un monde tournant à son rythme et selon ses règles, capable de mettre le feu au commissariat du coin ou de passer à tabac un paternel refusant de passer la main. C’est un parrain avant l’heure, prenant l’accent yiddish plutôt qu’italien. Babel est par ailleurs un profil littéraire tragique de l’Union Soviétique, dont le drame s’est noué différemment que celui de Boulgakov. Il fait indéniablement partie de ces auteurs dont le vécu – celui d’une personne issue d’une minorité, balloté dans tous les sens par le régime dont il a soutenu la mise en place et finalement tué par lui – teinte la compréhension de l’oeuvre d’une empathie particulière, celle qui permet d’apprécier le témoignage normal de la traversée des périodes de hautes amplitudes chaotiques et menaçantes.