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Le château des animaux de Dorison et Delep
Cette semaine sortait le très attendu quatrième et dernier tome du Château des animaux, une série commencée en 2018, sous format gazette. Sans grande surprise, dès que le nom de Dorison est associée à la production, on sait pouvoir compter sur la qualité de l’histoire. Cette production se distingue cependant par son sujet sous forme de fable animalière et son traitement exigeant.
Il faut le dire : quelle super série ! Tout y est : le dessin de Delep, le scénario de Dorison, l’ambiance, le rythme. Quelle maîtrise du récit de bout en bout pour cette œuvre d’inspiration orwellienne et au rendu si singulier. Vraiment le Château des animaux fait partie de ces séries récentes qui sortent du lot, tant le soin apporté à l’histoire et au scénario témoigne d’un travail en profondeur des auteurs.
L’histoire est simple. C’est celle de la conquête de sa liberté par une basse cour opprimée qui cherche le moyen de se débarrasser du règne tyrannique de Silvio, le taureau président à vie du château République où vivent tous ces animaux. Voies de la résistance contre voies de l’oppression. En chemin, la naissance du courage chez l’héroïne, la veuve Miss B qui élève seule ses deux chatons, se propage chez ses compagnons d’infortune. Les hésitations aussi. Les animaux sont séduits par la manifestation non violente. Mais survienne un coup de sang de la part du pouvoir et l’option vacille. L’histoire illustre à merveille la difficile tâche qui consiste à rassembler et fédérer au tour d’un projet émancipateur, plus encore à maintenir dans le temps les cap et méthode retenus.
Comme pour son 1629, Dorison nous offre un cours tout droit sorti d’un manuel pratique de science politique. Chaque personnage et chaque groupe social, particulièrement importants dans la mise en place des enjeux individuels et collectifs, témoignent d’un travail minutieux d’écriture. La lutte pour le pouvoir rendue dans le récit montre de façon réaliste toute la complexité qu’il y a à remettre en cause un statu quo : peur de perdre les quelques maigres acquis, opposition entre travailleurs surexploités et forces de l’ordre entretenues dans leurs privilèges, jalousie d’un groupe envers un autre, hantise de l’attaque d’une menace extérieure, centralité des stocks de nourriture… Le château est un laboratoire à petite échelle d’une société prête à exploser.
Il y a un vrai plaisir à voir se conclure avec brio cette série courte qui a su maintenir un niveau d’exigence et de qualité tout au long de ses années de production !









